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Le 1er mars 2020 au matin, une longue cohorte part des hauts de Lausanne, dévale la vallée du Flon et, suivant sans hâte le cours de la rivière, parvient jusqu’à la rive du lac au crépuscule. Cette prome- nade dominicale, ponctuée d’interventions scientifiques et artis- tiques, aboutit devant un plateau du théâtre de Vidy, avec droit à film, photo, rap et musique. Elle sera la première d’une série de neuf qui auront réuni près d’une cinquantaine de personnes chacune, et jusqu’à quatre-vingts selon l’itinéraire et le climat du jour.

Placées sous le label LAC (pour Léman Architectures Connexions), elles étaient offertes par un groupe de professionnel·le·s de l’archi- tecture et ouvertes à tout public. Elles ont proposé un arpentage du territoire lémanique en tant qu’ensemble géographique examiné sous les angles les plus divers et sans égard pour les découpages politiques. Misant sur la multiplicité des points de vue, elles invi- taient à l’exploration du territoire dans toute sa richesse, présente et passée, naturelle et humaine. Ont été sollicitées les approches les plus diverses, érudites, artistiques, musicales, sensibles et bariolées, développées au cours des promenades par des invité·e·s généreux·ses de leur savoir et de leur art.

Les promenades à peine lancées, irruption du Covid-19 et confine- ment ! LAC 2020, qui se déroule en extérieur, de manière souple, bénévole et gratuite, se remet aisément de ce coup d’arrêt. L’été venu, les promenades reprennent à une cadence ralentie, selon un programme prolongé, sous le nom LAC 20.21. Les intervenant·e·s, en particulier les artistes muselé·e·s des mois durant, y retrouvent une respiration. La pandémie aura conféré au projet une pertinence ren- forcée. Les balades s’achèvent le 7 septembre 2021 par une croisière lacustre et une grande réunion au château de Chillon.

Les promenades LAC ont pris leur élan à... Séoul ! Le futur comité LAC s’y rend en 2017 ; il s’est donné pour mission de décrocher, pour la région lémanique, l’organisation du 75e anniversaire de la

puissante Union internationale des architectes (UIA). Le groupe en repart bredouille mais heureux car décoré de la médaille d’argent et titulaire d’un honorable deuxième rang. Conscient surtout d’avoir échappé à une victoire redoutable, il se sent immensément sou- lagé, ayant mesuré le caractère convenu d’un congrès d’envergure et le poids de son organisation. Faut-il déplacer et réunir en un seul lieu des milliers d’architectes du monde entier ? Faut-il prendre part aux rivalités entre villes et entre nations ? L’heure est-elle à la défense d’intérêts touristiques et hôteliers ? Le Covid ne tarde pas à y répondre de manière cinglante.

Ayant retrouvé leur cap en tant que professionnel·le·s, en tant que citoyen·ne·s, nos architectes lacustres décident alors de reprendre à leur compte la question, toujours aiguë, toujours urgente, qui a pré- sidé à la fondation de l’UIA : quelle tâche incombe à l’architecte dans un monde en ruines ? Le comité constitué y répondra en dévelop- pant à son rythme le projet « L’architecture et l’eau » esquissé en vue de l’anniversaire de l’UIA en 2023. Mais par où commencer et com- ment ? La réponse s’impose, toute simple : en reprenant pied dans le territoire et en s’y promenant collectivement.

Déambuler, découvrir, réfléchir en recueillant l’expérience et les connaissances de tous. C’est ainsi que les thèmes défendus à Séoul, LAC 20.21 les a retrouvés le long des rivières et des forêts lausannoises, sur la frontière de Saint-Gingolph, autour des proprié- tés de La Côte, entre les strates géologiques du val d’Hérens, dans les vignobles du Lavaux, sur les terrasses d’Évian, au fil du Rhône à Genève et jusqu’au sommet du Salève.

Renouer physiquement avec l’espace, c’est regagner aussi l’usage du temps. Fort de cet acquis, LAC étend son chantier et son ambi- tion. En suivant le cours de l’eau, il entend considérer aussi le bassin- versant des rivières ainsi que les sols en profondeur. En 2023, les promenades, horizon élargi, reprendront par monts et par vaux, avec leur lot d’inattendus, d’évocations, d’illuminations.

Lorette Coen

Comité : Manuel Bieler, Lorette Coen, Jeanne Della Casa, Nicolas Monnerat, Sarah Nedir, Christiane von Roten, Tanya Zein

Commissaires : Héloïse Gailing, Matthieu Jaccard

Images : Michael Hartwell

Graphisme : Notter + Vigne

www.leman-architectures-connexions.net

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